Exactement trente ans (28 février 1990-28 février 2020) que, sur une note de satisfaction générale, les travaux de la conférence des forces vives de la nation prenaient fin à Cotonou à l’hôtel PLM Alédjo. Trois décennies en effet, que quatre-vingt-treize délégués (493), représentants les béninois de tous âges, de toute catégorie socio professionnelle et de tout bord politique, à l’invitation géniale du feu Général Mathieu Kérékou, alors Président de la République populaire du Bénin, ont courageusement et définitivement lancé le Bénin dans la voie du renouveau démocratique.
Feu le Professeur Albert Tévoèdjrè, rapporteur de cette conférence a dans son rapport général déclaré : « Parce que nous avons juré de ne plus jamais humilier l’intelligence, parce que les chaines sont brisées et que nous avons définitivement conquis le droit de parler au nom de l’Afrique et des libertés fondamentales des hommes et des femmes de ce continent, parce que nous entrons désormais en partenaire majeur dans un monde majeur, parce que la nuit s’est dissipé et l’aube nouvelle rayonne : au travail mes amis ! Nous avons vaincu la fatalité ». A sa suite, alors que l’ensemble du peuple béninois (conférenciers ou non) étaient dans une anxiété générale au sujet de l’acceptation ou pas des décisions de cette grande messe politique, le Général Mathieu Kérékou prononce un mémorable discours, un discours de délivrance et de grande responsabilité. Il disait en substance : « Aujourd’hui mercredi 28 février 1990, nous prenons à témoin, le peuple béninois tout entier, en affirmant solennellement, notre engagement à faire mettre en œuvre, de manière réaliste, toutes les décisions issues des travaux de la conférence des forces vives de la nation ». Il renforce cette promesse par ces mots teintés de solennité, d’humilité et de gravité : « Au nom de l’intérêt supérieur de la nation, et du peuple béninois tout entier, nous disons que les décisions prises par la conférence nationale seront appliquées dans l’ordre et la discipline librement consentie. Ce n’est pas du défaitisme, ce n’est pas la capitulation, c’est une question de responsabilité nationale ». Après un tel discours de grande portée, à l’endroit du Général Mathieu Kérékou, Monseigneur Isidore de Souza déclara avec une grande émotion : « vous avez posé un acte qui est juste et qui est historique et dont le Bénin vous saura toujours gré longtemps ».
Aujourd’hui 28 février 2020, à l’occasion du trentième anniversaire de ce renouveau démocratique, je me fais, encore une fois, le devoir de rendre un hommage mérité à tous les délégués à cette historique conférence particulièrement au Général Mathieu Kérékou (principal initiateur de la conférence), à Me Robert Dossou (Président du comité préparatoire de la conférence), au Doyen Salomon Biokou (Président du bureau d’âge), à Monseigneur Isidore de Souza (Président du présidium) et au Professeur Albert Tévoèdjrè (Rapporteur général de la conférence). A ces dignes fils cités, notre peuple n’a pas fini de rendre l’hommage qu’il mérite et j’insiste la dessus. Ils méritent largement mieux.
Aujourd’hui 28 février 2020, trente ans après cette décisive conférence, concédons que le renouveau démocratique béninois bégaie et est à la recherche de son second souffle. Il a besoin d’être secouru pour poursuivre son chemin vers l’atteinte des objectifs tels que souhaités par les pères fondateurs. Il s’agit essentiellement de rétablir les équilibres républicains, de mettre fin à l’anarchie qui prévaut dans tous les secteurs vitaux du pays, d’arrêter le désordre et l’irresponsabilité collective qui règne à tous les niveaux, de ré sacraliser l’Etat en vue de le remettre sur son piédestal, de mettre fin au règne de l’argent et de tout faire pour promouvoir les valeurs républicaines, morales et sociales. Il s’agit d’affronter courageusement la situation anarchique enrobée d’un parfum démocratique qui a cours dans le pays depuis un certain temps. Situation qui a fait déserter le forum aux sachants et à tous ceux qui sont capables pour malheureusement laisser place aux Totos et bâtards politiques. Un vrai gâchis qu’il urge de corriger et impérativement. Fort heureusement, les béninois ont trouvé chaussures à leurs pieds depuis le 06 avril 2016. Cette triste situation, contraire à l’esprit de la conférence nationale, est affrontée vaillamment par le Président Patrice Talon. Les changements difficiles s’opèrent, l’autorité de l’Etat est restaurée même si des résistances sont signalées ici et là, la rigueur républicaine prend place, de nouveaux caps se fixent, l’esprit de la conférence nationale renaît et peu à peu la République se relève. Nous ne pouvons pas continuer à nous mentir, il faut mettre fin au désordre, devenu la règle, pour que vive le Bénin tel que rêvé à la conférence nationale. Certainement que ce ne serait pas chose facile et le premier à le savoir, c’est le Président Patrice Talon lui-même. Ce n’est pas pour rien qu’en recevant le Clergé béninois, il disait entre autres : « Priez pour moi pour que je tienne jusqu’au bout… ». Je profite de cet heureux anniversaire pour implorer le Clergé et même des responsables d’autres confessions religieuses de ne pas hésiter à prier pour lui pour qu’il tienne jusqu’au bout. Il y va de l’intérêt de ce pays et de son peuple. Chaque chose doit reprendre sa place et chacun devra rejoindre son couloir, il faut finir avec le yoyo et le bal masqué. Le Bénin doit rester debout pour que les béninois s’y portent mieux. J’en appelle humblement à un retour effectif à l’esprit de la conférence nationale, à un réarmement moral de chacun d’entre nous et à une conscience citoyenne pour que vive la République et que vive le Bénin.
Moukaram A.M.BADAROU
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