Il y a quelques jours, j’ai sauté au plafond en apprenant que l’un des produits du professeur Agon baptisé « Apivirine » avait été testé sur des malades du Covid-19 au Burkina Faso et avait donné des résultats impressionnants. J’étais non seulement remplis de fierté, mais aussi soulagé en me disant qu’au moins sur le continent un produit permet de limiter les impacts de cette maladie sur les patients.
Nous avons lu des articles de la presse burkinabè et avons vu des vidéos qui faisaient l’éloge de ce remède.
Puis subitement, peu de jours après, on assiste stupéfait à une volte-face sans précédent. En effet, les mêmes qui vantaient les mérites du remède et qui avaient dit que des malades du Covid-19 ont montré des signes d’amélioration après avoir pris ce médicament affirment aujourd’hui le contraire : l’Apivirine n’aurait été testé sur aucun malade du Covid-19.
Les autorités auraient-elles reçu des pressions pour lâcher le professeur ? L’histoire de patients guéris avec l’Apivirine serait-elle une simple invention et donc une arnaque ? À cette étape des choses, personne ne peut rien affirmer. Il parait que des essais cliniques seraient en cours. Attendons les résultats et voyons la suite s’il y a bien évidemment des essais cliniques en cours.
Il revient néanmoins, à la lueur des derniers rebondissements de l’histoire « Apivirine », de souligner les 3 erreurs fondamentales du Professeur Agon.
Sa première erreur c’est le manque de discrétion. Quand on est face à une pandémie planétaire et qu’on a un remède qui aurait guéri quelques cas dans un cadre privé, on garde ses résultats pour soi-même, car ils ne seront recevables nulle part. On lance d’abord dans le plus grand secret, en respectant le protocole, des essais cliniques et on fournit à la fin de ses essais cliniques des résultats ainsi que des témoignages de malades soignés et guéris. C’est seulement après cela qu’on se livre à la médiatisation, car la phase de la médiatisation est la phase pendant laquelle l’industrie pharmaceutique et tout le lobby qui l’entoure essaieront de détruire tout ce qui peut nuire à leurs intérêts.
Bref le Professeur s’est jeté à l’eau sans préparer de gilet de sauvetage. Seules des preuves scientifiques attestent de l’efficacité d’un remède et tant qu’on n’a pas ces preuves incontestables on évite les médias. Travailler sur un projet sans que personne ne cherche à nous ralentir n’est pas la même chose que travailler sur un projet lorsque tout le monde veut nous voir échouer et le professeur a sous-estimé la puissance de ce qu’il avait en main comme solution.
La deuxième erreur du professeur c’est le changement de nom de son médicament. L’Apivirine n’est pas un nouveau médicament, mais un vieux médicament qui aurait donné des résultats prometteurs sur des malades du Covid- 19. Le professeur s’est empressé de rebaptiser son médicament Api-Covid19. Par tous les saints, pourquoi ? Est-ce qu’on a rebaptisé la chloroquine, chloro-covid19 parce que ça donnait des résultats satisfaisants sur les patients ? Le fait de changer le nom à son médicament, a poussé plusieurs personnes à penser qu’il voulait jouer sur la tendance et faire croire qu’il avait trouvé un nouveau remède au Codiv19 : ce qui n’était pas son intention, je crois. La ligne de communication aurait dû être celle de la chloroquine. On ne change pas de nom, et on insiste sur le fait que ce n’est pas un nouveau médicament, mais un vieux médicament qui apparemment donne de bons résultats sur le covid-19. Point final. Parfois il ne faut pas en faire trop.
La troisième erreur et la plus fatale c’est l’augmentation du prix. J’aurais appris que le produit Apivirine est passé subitement de 2500 à 12500 FCFA. Je ne sais pas si c’est vrai. Mais si c’est le cas, c’est que le Professeur s’est lui-même piégé en se tirant une balle dans les jambes.
En France, quand le Professeur Raoult a parlé de la chloroquine, on a essayé de le ridiculiser et le faire passer pour un fou. S’il n’avait pas reçu le soutien d’une bonne partie de la population, je pense que son histoire aurait été enterrée.
Aujourd’hui, si le traitement du professeur Agon est rejeté ou qu’on l’empêche de démontrer son efficacité, combien de gens vont venir se battre avec lui. Les mêmes qui ont été dégoûtés de voir le prix du produit grimper sans état d’âme ?
En augmentant le prix de vente de l’Apivirine tout en connaissant le pouvoir d’achat de nos populations, il a décidé consciemment ou inconsciemment de donner son remède aux riches uniquement et de punir les pauvres. Si avant le covid-19 il vendait son produit à 2500 FCFA sans perte, pourquoi pense-t-il qu’en période de covid-19, ce prix n’est plus rentable ? J’aurais eu autre réflexion à sa place. Il vaut mieux vendre un produit de 2500 FCFA à 1 million de personnes que de le vendre à 12500 FCFA à 100 mille personnes. Mais bon c’est le péché de l’entrepreneur francophone ça.
Certains ont acclamé le fait que le Professeur a augmenté le prix de son produit, car les Africains ne soutiendraient pas leurs entrepreneurs. Api-pharma sait que cet argument n’est pas valable pour elle, car dans presque tous les foyers africains on a déjà acheté Api-palu une fois. La population a accordé sa confiance à Api-pharma et ses produits dès ses débuts. Chez moi, en cas de paludisme, on allait s’offrir une boite d’Api-palu dont l’efficacité était avérée. Alors dommage qu’au moment où la population a le plus besoin de son remède, il décide d’augmenter les prix de façon totalement révoltante.
Bref, dans la guerre contre le lobby pharmaceutique quand tu n’as pas le soutien du peuple, il est peu probable que tu gagnes. Il ne fallait donc pas augmenter le prix de l’Apivirine, alors que les résultats des tests cliniques n’étaient même encore là.
Ceci étant, si j’étais en Afrique et que je tombe malade, j’irai quand même acheter l’Apivirine en espérant que le professeur Agon va revenir à ce qu’il sait faire de mieux, c’est-à-dire aider son peuple en mettant à sa disposition des remèdes accessibles à tous et non réservés uniquement aux riches. Ne laissons pas la recherche effrénée de gain nous empêcher de nous mirer dans la glace demain. Soyons humains !
Ghislain KODJO
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