Le Journal de NOTRE EPOQUE

Journal béninois d’investigation, d’analyses et de publicité – Récépissé N° 953/MISPCL/DC/DAI/SCC du 27 mars 2007

Culture : «Chérissons l’héritage de Manu Dibango», dixit Ousmane Alédji

Sans l’avoir côtoyé de très près, le promoteur culturel Ousmane Alédji connait pourtant Manu Dibango, « le Vieux » comme aimaient l’appeler ses amis. Il l’a plus ou moins apprécié et fait partie des premiers acteurs culturels à saluer la grandeur de l’homme. Voici en substance, ce qu’il nous a confié de Manu Dibango. « Il avait fini par accepter son statut de premier vétéran des musiciens africains français ou africains ‘’résistants ‘’ en France. Il se baladait avec sa magnifique canne et le crâne scintillant pour mieux incarner son rôle, cela en faisait un drôle de personnage parce qu’on voyait bien qu’il n’avait pas besoin de canne. Il est sans aucun doute l’un des plus illustres pères et le grand père des musiciens d’Afrique. Sa mort me ramène paradoxalement vers la musique de Fela, un autre monument de la musique africaine qui emportait ma sympathie et mes convictions. C’était fou. Les deux alimentaient nos débats de jeunes mélomanes et mauvais danseurs. Les deux étaient dans des registres différents : de l’afrobeat inspirés de la Juju musique nigériane et de l’afrojazz Irriguée par ce que Manu appelait la Soul makossa. Ces deux personnages, n’en déplaisent à leurs détracteurs sont, selon moi les inventeurs du concept de la world musique. Ils ont grandement contribué à faire comprendre au monde entier que les africains savaient produire autre chose que des folklores et des percussions exotiques. Nous leur devons beaucoup. Manu Dibango n’était pas un ami mais j’ai pris l’avion plusieurs fois avec lui et nous nous sommes rencontrés aussi sur quelques scènes en Europe où il a joué avant où il va jouer après nous. Sa voix ne s’imposait pas seulement dans les micros, elle s’imposait aussi dans les espaces. Il n’avait pas besoin d’élever la voix. Il était puissant. Aussi charpentée que le personnage lui-même. Je regrette un peu que sa fin soit dû à une catastrophe qui nous tombe depuis l’on ne sait où. Quand on racontera son histoire on pensera à cette ‘’Coronaconnerie’’. Ce n’est absolument pas juste… Chérissons son héritage et qu’il repose en paix ».